Je souris, le regard fixe sur la rue, dehors, sur les passants du trottoir, tout près, sur le temps qui passe, surtout. Que pensent-ils? Où vont-ils? Et l'amitié eux? Mon doigt glisse, sur la tasse à café, la déplaçant, au gré des vas et viens de mes pensées. La poignée tourne, l'aiguille tourne aussi, au son des secondes qui tombent sur le monticule dans le sablier. La mousse est séchée sur le bord de la tasse. Le sucre au fond se baigne dans une mare de crème au café. C'est moi, je sais, qui ne respecte pas cette boisson des rencontres heureuses et des discussions sans fin en compagnie. Et ces passants, que pensent-ils de l'amitié ? Et Joseph, lui, seul sur le coin du La Baie, à chercher cette amitié dans le regard de chaque quidam, la pitié surtout. La napkin est collée dans le cerne de café. La mousse et le sucre sont collés sur le bâtonnet brun. Les tasses se bousculent au bord du vide, du gouffre, de la fin du monde de la table. La discussion a probablement été longue? Non! Du bon temps? Non plus! Et ce sourire? C'est pour ne pas pleurer. Qui ? Celle qui n'est pas venue, cette amie d'une vie passée. Appelle-là? Elle ne le sait pas; elle n'aurait donc pas pu y être; elle ne le saura pas non plus. En venant ici en quête d'inspiration j'ai ouvert mes mémoires et elles se sont étalées sur moi comme les empilements poussés dans le haut un placard trop petit. Dans mes yeux il pleut dehors. Un instant le temps est gris. Le temps de remettre un ordre dans mes souvenirs. De ranger le tout, de pousser un peu alors que j'essaie de refermer la porte qui grince et gémit. Jusqu'à la prochaine fois, où j'aurai le goût de toi mon amie. Où j'aurai besoin de te parler afin de t'expliquer où ma vie s'en va, en quelques mots, que toi tu comprendras. Et comment je marche sur la route de celle-ci. Mais je t'implore une autre dernière fois, avant de te ranger tout la haut pour une étincelle d'éternité, laisse-moi t'étreindre et ensemble disons merde au vieux dicton.
SB
E:31-10-2004
R:26-11-2010